Crée par la loi relative à la transparence de la vie publique du 11 octobre 2013, la Haute Autorité pour la transparence et la vie publique (HATVP) est dirigée par Jean-Louis Nadal. La HATVP est une autorité administrative indépendante (AAI). Ce statut lui permet de bénéficier d’une autonomie fonctionnelle et de n’être assujettie à aucune instruction d’une quelconque autorité. Elle est malgré tout soumise au contrôle du Parlement et de la Cour des Comptes. Son objectif « n’est jamais de déstabiliser les institutions ; il est au contraire, de les renforcer en les rendant exemplaires. Car les hommes passent, mais les institutions demeurent. Elles font la force de la démocratie. » En 2016, pour assumer cette mission, 40 agents travaillent dans cette AAI et 56,7% des agents sont des femmes. En 2016, les crédits de la HATVP s’élèvent à 3989630 euros en crédits de paiement. Les dépenses de personnel sont de 2 583 558 euros. Elles représentent donc 64,6% du budget.

Le rapport estime que le bilan du contrôle des déclarations patrimoniales des hauts fonctionnaires HATVP est « globalement positif ». Pour les députés et sénateurs élus en 2011 et 2014, 1048 déclarations ont été examinées, 67,4% d’entre-elles sont classées sans suite ; 29,2% ont été accompagnées d’une déclaration modificative ; 2,2% ont été soumises à des appréciations et 1,2% des déclarations ont été renvoyées devant le Parquet. Le contrôle se fait en fonction de différentes modalités. La première est la prévention des conflits d’intérêts par l’intermédiaire : des déclarations d’intérêts, de la gestion sans droit de regard des instruments financiers détenus ainsi que de la comptabilité d’anciennes fonctions gouvernementales avec une activité libérale ou d’une activité rémunérée au sein du secteur concurrentiel. La seconde modalité est le contrôle de la probité : vérification de la situation fiscale, déclaration de situation patrimoniale, déclaration de situation patrimoniale de fin de mandat et l’examen de la variation de patrimoine au terme des fonctions. Enfin, la dernière est celle de l’exigence de transparence par la publication des déclarations d’intérêts et de la situation patrimoniale sur le site hatvp.fr.

Dans une dynamique qui se veut performante, la Haute Autorité effectue trois types de contrôle systématiques sur les déclarations. Le premier est un contrôle formel destiné à rechercher si la personne contrôlée est bien soumise aux obligations déclaratives. Le second a pour objectif d’identifier rapidement s’il existe des conflits d’intérêts. A ce titre, « entre le 1er juillet 2015 et le 30 juin 2016, la Haute Autorité a procédé à l’examen de plus de 3 300 déclarations d’intérêts ». Le troisième vise à contrôler l’absence de variation inexpliquée de patrimoine entre le début et la fin du mandat ou des fonctions : « en 2016, 2 000 contrôles de variation patrimoniale ont été effectués ».

En 2016, les critères pouvant engager un contrôle approfondi pouvaient être : « un pourcentage de revenu mensuel épargné élevé, sans explication apparente ; l’existence d’actifs détenus à l’étranger, déclarés en début de mandat et non en fin de mandat sans explication ; l’absence de constitution d’un patrimoine, compte tenu des revenus et activités déclarés ». Les motifs de soumission des déclarations de situation patrimoniale à un contrôle approfondi sont au nombre de trois : anomalies constatées lors de l’examen de la variation patrimoniale (40%), contrôles aléatoires (25%), déclarations représentant des défauts formels, signalements extérieurs ou personnalités particulièrement exposées (35%). Malgré la volonté de la HATVP de contrôler le patrimoine des hauts fonctionnaires de l’Etat, certains éléments patrimoniaux restent difficiles à évaluer tels que les biens exceptionnels et les titres non cotés.

Au rang des difficultés, la Haute autorité est confrontée au contrôle de l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) des parlementaires. Cette indemnité forfaitaire est perçue mensuellement par chaque parlementaire « afin de prendre en charge les frais inhérents à l’exercice de son mandat ». Elle comprend trois éléments : l’indemnité parlementaire brute (7 185,60 euros par mois) ; la prise en charge des frais (5 840 euros brut + déplacements par mois) et les crédits collaborateurs (9504 euros par mois). Pour lutter contre les transferts d’argent douteux, le Conseil constitutionnel a, en 2013, proscrit l’affection sur l’IRFM « au financement d’une campagne électorale à laquelle le député est candidat ». Cette disposition a été reprise et complétée par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique puisque désormais aucun candidat à une élection « ne peut utiliser, directement ou indirectement, les indemnités et les avantages en nature mis à la disposition de leurs membres par les assemblées parlementaires pour couvrir les frais liées à l’exercice de leur mandat ». En février 2015, l’Assemblée nationale a interdit l’imputation sur l’IRFM « de toutes dépenses afférentes à une nouvelle acquisition de biens immobiliers, défini une liste de cinq grandes catégories de dépenses autorisées et demandé aux députés de remplir une attestation sur l’honneur que leur IRFM servirait bien à couvrir ces dépenses ». En outre, l’utilisation de cette indemnité fait l’objet d’une attention particulière de la part du déontologue de l’Assemblée nationale M. Ferdinand Mélin-Soucramanien. Dans son rapport de 2016, ce dernier constate que « le sujet qui préoccupe le plus les députés ayant demandé une consultation au déontologue reste de façon majoritaire l’utilisation de leur indemnité représentative de frais de mandat ». Malgré tout, il n’existe pas encore de contrôle effectif de l’usage qui est fait de l’IRFM par les parlementaires, « seul un contrôle a posteriori peut-être effectué à la demande du Bureau de chaque assemblée [Assemblée nationale et Sénat] ». Faisant écho à l’affaire relative à l’emploi présumé fictif de Pénélope Fillon en tant qu’assistante parlementaire, le Président de l’Assemblée nationale avait annoncé le 22 février 2017 « la création d’un groupe de travail qui examinera les règles d’emploi des collaborateurs des députés –règles de recrutement, fixation des salaires, dispositifs de contrôle- et l’utilisation de l’IRFM. Le groupe examinera notamment les meilleures pratiques en vigueur dans les parlements étrangers ».

Malgré tout, le rapport de la Haute Autorité se félicite du caractère impartial et confidentiel de son activité. En effet, au terme de l’article 19 de la loi n°2013-907 « aucun membre de la Haute Autorité ne peut participer à une délibération ou procéder à des vérifications et contrôles relatifs à une personne ou à un membre d’un organisme à l’égard duquel il détient ou a détenu, au cours des trois années précédant la délibération ou les vérifications et contrôles, un intérêt direct ou indirect ». L’article 1er du décret n°2014-90 du 31 janvier 2014 précise que « lorsqu’un membre, autre que le président, estime que sa participation à une délibération le placerait en situation de conflit d’intérêt, il en informe par écrit le président dès qu’il a connaissance de cette situation ou, au plus tard, au début de la séance au cours de laquelle l’affaire en cause est délibérée. Le président informe les autres membres sans délai des conflits d’intérêts dont il a connaissance ou de ceux qui le concernent ». En outre, la Haute Autorité souligne une amélioration significative de la coordination avec la direction générale des finances publiques (DGFIP). En effet, la situation fiscale des membres du Gouvernement est vérifiée au titre de l’article 9 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Les déclarations de situation patrimoniale des membres du Gouvernement et du Parlement sont contrôlées en coopération étroite avec la DGFIP. La loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 a quant à elle accordé à la Haute Autorité l’accès aux applications informatiques de la DGFIP utiles à l’examen des déclarations de situation patrimoniale « en vue de procéder elle-même aux vérifications les plus courantes ». Pour faciliter sa mission de contrôle, la Haute Autorité propose de permettre à cette dernière « d’obtenir directement communication auprès des professionnels et des administrations nécessaires à l’exercice de sa mission de contrôle ».

Dans son rapport, la Haute Autorité regrette que sa mission de contrôle soit affectée par le calendrier électoral de 2017. En effet, compte-tenu des échéances électorales de 2017, le nombre de dépôt de déclaration devrait croître d’environ 20% (6 006 en 2016 et 7 100 en 2017). Certaines déclarations seront obligatoirement contrôlées telles que celles des 38 membres du Gouvernement sortants et entrants, de même pour les 577 députés et les 170 sénateurs sortants et entrants. Or, cette hausse du nombre de contrôle de situation patrimoniale se heurte à un calendrier légal de publication des déclarations impossible à honorer. A titre d’exemple, le temps nécessaire à l’élaboration des avis concernant les 577 députés est estimé à deux mois alors que le délai légal est de 30 jours. Se refusant à publier des déclarations non contrôlées, la Haute Autorité s’engage donc à ne publier que les déclarations scrupuleusement vérifiées. Pour remédier à ce problème, elle propose « d’avancer la date de dépôt des déclarations de fin de mandat des parlementaires et allonger les délais impartis par la loi à la Haute Autorité pour procéder au contrôle des déclarations de situation patrimoniale qu’elle doit rendre publique ».

Enfin, la Haute autorité se donne pour nouvelle mission d’assurer « la transparence entre les représentants d’intérêts et les responsables publics ». En janvier 2015, le rapport de la Haute Autorité Renouer la confiance publique, soulignait « le rôle essentiel des représentants d’intérêts, ou lobbies, dans l’élaboration de la décision publique tout en relevant l’insuffisance de l’encadrement juridique de leur activité ». Le présent rapport analyse l’intervention d’intérêt privé auprès des pouvoirs publics comme étant « largement étrangère à la tradition politique française imprégnée d’une conception verticale, unilatérale et transcendantale de l’intérêt général ». Pour lutter contre l’opacité des recours à ces groupes d’influence, une première mesure avait été prévue en juillet 2009 lorsque le Bureau de l’Assemblée nationale a élaboré une réglementation prévoyant l’inscription volontaire des représentants d’intérêts sur un registre rendu public sur le site de l’Assemblée. Sans surprise, le nombre d’inscription a été limité. En vue de plus de transparence la loi n°2016-1961 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernité de la vie économique a été promulguée le 9 décembre 2016 après la décision du Conseil constitutionnel (décision n°2016-741 DC rendu le 8 décembre 2016). Le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la constitutionnalité des dispositions de l’article 25 de la loi relatives à la création d’un registre numérique des représentants d’intérêt commun aux assemblées et aux obligations incombant à ces derniers. Le Conseil a validé la constitutionnalité de la création du registre numérique en ce qu’il ne contrevenait pas à la séparation des pouvoirs et à l’autonomie des assemblées. En revanche, il a jugé que les sanctions pénales en cas de violation des obligations déterminées par le bureau de chaque assemblée étaient inconstitutionnelles car elles méconnaissaient le principe de légalité des délits et des peines. Il restera donc à analyser la pertinence d’un tel registre dépourvu de tout effet dissuasif.

NB : cette note a été réalisé à partir d’éléments objectifs en se fonde sur le rapport d’activité 2016 de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

aloysia biessy