Avis général de l’Institut Renaissance au sujet de la réforme pénale
Cette proposition de loi inquiète les Français et les professionnels de la Justice. La disparition des peines planchers, la révocation automatique du sursis, les crédits de réduction de peines automatiques sont autant de modifications qui vont dans le sens des articles les plus laxistes de la réforme pénale de 2009. Par ailleurs le texte fait l’économie des travaux essentiels sur la prévention de la délinquance et sur la construction de nouvelles places de prison.
La majorité socialiste est elle-même circonspecte devant cette réforme, à l’image d’un Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois, qui écrivait sur son blog : « Ce serait donc un curieux message que de mobiliser prioritairement du temps parlementaire pour traiter ces questions. »
L’Institut pour la justice, principale organisation de défense du droit des victimes n’a pas été conviée par la Garde des Sceaux. Le dogmatisme et l’idéologie semblent aujourd’hui l’emporter comme le note Phillipe Bilger dans l’Opinion : « Mais la chancellerie est peu à peu noyautée par des personnes sur sa ligne et celle du Syndicat de la Magistrature. Christiane Taubira est tuée par son dogmatisme. »
Une fois de plus la classe politique montre sa déconnection du pays réel. Ainsi le sénateur UMP Jean-René Lecerf de déclarer à Libération le 11 mai : « Il est tellement facile de dire laxisme en espérant toucher des électeurs égarés vers les extrêmes. » Les Français sont pourtant une majorité à en rejeter les dispositions comme le montre un sondage du CSA (70% d’opposition à la contrainte pénale, 66% à la libération sous contrainte.)
La théologie de la libération par Christiane Taubira
Pour nous ce texte néglige le millefeuille procédural des peines alternatives à l’incarcération. Dans une enquête datée du 15 mai, le journaliste Paul Gonzalès souligne par ailleurs l’impossible application concrète des dispositions. Ainsi les personnes portant un bracelet électronique ne peut plus être effectivement surveillées car les bureaux de gestion sont débordés en fin de semaine, les condamnés obtenant des permissions du vendredi au lundi soir dans les faits. Ce qui ne laisse donc plus que trois jours d’observation. Notons que ce dispositif est pourtant favorisé actuellement.
Au prétexte d’empêcher les sorties sèches, le législateur propose la mise en place de processus obligatoires de sorties encadrées à deux tiers de la peine. La libération plutôt que l’exécution de la peine est ici clairement encouragée. 80% des condamnations prononcées pour la justice concernent les délits sujets à un emprisonnement de moins de cinq ans, cette population délinquante sera le plus souvent amenée à ne pas effectuer sa peine pour plutôt accéder à des procédures de contraintes pénales. C’est pourtant cette population qui est la plus concernée par la montée du sentiment d’insécurité.
Preuve des troubles causés par ce millefeuille, 1000 postes au service de probation et d’insertion devront être créées avant 2017 afin de gérer ces diverses modalités.
Le nombre de place de prison.
Fin 2012, 99600 peines de prison étaient en attente d’application. L’Institut pour la Justice estime qu’il faudrait construire rapidement de 20 000 à 30 000 places. Christiane Taubira a promis la construction de seulement 6600 places de prison alors même que l’état de notre système pénitentiaire est régulièrement pointé du doigt.
La somme de ces dispositions n’est sans doute pas étrangère au fait que 75% des Français déclarent que cette réforme ne fera rien pour prévenir la délinquance (IPSOS). Ils sont une majorité à rejeter les notions de peine indolore, de délinquant devenant acteur de sa peine ou encore de comblement du fossé entre le délinquant et son agresseur. Une tendance qui confirme le processus entamé sous Nicolas Sarkozy en 2007 établissant déjà la prison comme ultime recours.
L’importance de la notion d’autorité dans la société.
Christiane Taubira part du principe que « la sévérité ne réduit pas la récidive ». Or nous l’avons vu depuis la réforme de 2009, toujours plus de mansuétude ne fait pas diminuer l’insécurité, bien au contraire.
Dans une société où de nombreux parents ont failli à leur devoir d’autorité vis-à-vis de leurs enfants, l’institution judiciaire ne peut faillir au sien. L’autorité judiciaire est le pilier de la démocratie et de la cohésion sociale, nous ne pouvons pas prendre le risque de l’affaiblir en favorisant la sortie de criminels n’ayant pas fait d’effort de réinsertion. L’aménagement des peines et la prison comme ultime recours ne permet pas de leçon. Le message de laxisme de la Justice serait préjudiciable.
Le refus de cette réforme pénale
Si le gouvernement poursuit bien le but d’assurer la sécurité de ses concitoyens, il doit renoncer à cette réforme. Le Premier ministre Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur à lui-même souligné les incohérences techniques, les faiblesses et les risques de cette réforme. Pour répondre aux préoccupations sécuritaires des citoyens et lutter contre la criminalité et la récidive cette réforme ne doit pas être appliquée.