La crise de l’école publique
D’après les chiffres de la Journée Défense et Citoyenneté (ex-JAPD), entre 20 et 30% des jeunes Français sont en situation d’illettrisme grave. Selon l’enquête triennale PISA menées par l’OCDE rendue en décembre 2013, l’école française serait parmi les plus inégalitaires. Elle serait avant tout faite pour les élites, qui ont de bons résultats. Ainsi, les inégalités se creusent largement entre les faibles et les forts ; selon les inégalités sociales ou encore selon les origines (les enfants d’immigrés ont plus de difficultés à l’école).
Après deux années de nombreuses annonces au ministère de l’Education nationale, peu suivies de réformes pour Vincent Peillon, le passage éclair de Benoît Hamon, c’est maintenant au tour de Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre des Droits des femmes, de s’atteler à cette lourde tâche. Mais elle semble particulièrement occupée à placer en priorité l’égalité (ou égalitarisme ?) entre les filles et les garçons ou à imposer la réforme des rythmes scolaires qui a été décidée sans la concertation des professionnels de l’enseignement et des élus locaux. Les défis de l’école semblent pourtant devoir répondre à d’autres priorités.
L’école : un problème global
Pour certains, la solution à cette grave crise de l’école serait le renforcement des matières fondamentales. Or, toujours selon le rapport de l’OCDE, les matières fondamentales occupent 60% du temps de classe, soit l’un des plus élevés. Le résultat espéré n’étant pas au rendez-vous, le problème doit sans doute être ailleurs. En effet, le problème est bien plus général et la solution doit être globale : formation des professeurs et enseignants, taille des classes, méthodes d’apprentissage et pédagogie, alternative au redoublement, aide aux élèves en difficulté…
L’école publique ne répond pas aux besoins des enfants et de nombreux parents en sont de plus en plus méfiants, à juste titre (nouveaux programmes scolaires et en particulier en histoire, « ABCD de l’égalité » généralisés à toutes les écoles par un plan national, nombre élevé d’élèves dans les classes, nouveaux rythmes scolaires avec des activités pédagogiques de qualité médiocre…).
La gauche nous présente souvent l’école suédoise comme le modèle à suivre, avec un système éducatif porteur de l’idéal égalitaire, du travail en équipe et de l’autoformation. Or, selon le rapport de l’OCDE le niveau des élèves baisse dans les matières fondamentales et de plus en plus de parents choisissent le privé (1/4 des élèves au primaire et 1/3 au collège).
En France, tout ceci fait également la part belle aux écoles indépendantes. Malheureusement, tout le monde ne peut se permettre un tel investissement et leur avenir pourrait être menacé par le Gouvernement, qui semble vouloir avoir la mainmise sur chaque enfant de la République.
La question de la transmission
L’un des problèmes qui nous semble majeur est celui de la transmission, comme l’expose François-Xavier Bellamy dans son ouvrage Les Déshérités ou l’urgence de transmettre.
Selon l’auteur, l’école ne transmet plus, elle « éduque ». La cause : l’évolution de l’histoire de la pensée, qui a installé l’idée selon laquelle l’enfant devrait apprendre par lui-même, afin de penser par lui-même. Pour démontrer cela, Bellamy met en cause la pensée de 3 auteurs : Descartes, Rousseau et Bourdieu. Descartes, tout d’abord, considère l’éducation comme une tragédie infligeant des savoirs que l’homme n’a pas contrôlés. Rousseau, quant à lui, estime que l’enfant est un être à l’état naturel, que l’adulte viendrait pervertir. Il déplore donc tout contact entre les deux. Pour Bourdieu, enfin, la culture est perçue comme un facteur de discrimination.
Or, l’enfant se construit par la confrontation aux autres et à son héritage. Nous sommes des êtres de nature et de culture. En supprimant l’apprentissage dans nos écoles, nous discriminons en réalité les enfants qui ne reçoivent pas cette culture au sein de leurs familles. Le savoir n’est pas aliénant, il est au contraire source de liberté, car nous y puisons le meilleur de ce que notre culture a à nous transmettre.
Mais l’Education nationale demande malheureusement à ses professeurs de ne surtout pas transmettre un savoir que l’enfant ne connaîtrait pas, afin de ne pas créer de sentiment d’inégalité ou d’oppression. Il faut au contraire créer les conditions dans lesquelles les enfants vont produire leur propre savoir. Il s’agit donc bien là d’une méthode d’apprentissage, d’une pédagogie fort discutable et dans doute à réformer.