Attention l’agriculture française est en danger
Tous les deux jours, un paysan français se suicide dans l’indifférence générale. A l’heure du Salon de l’agriculture cette triste réalité doit être prise en compte. Notre agriculture, clé de voûte d’une industrie agroalimentaire qui constitue un atout majeur de notre pays, une marque de qualité reconnue est en train de disparaitre sous les effets conjugués d’une politique agricole commune défaillante, de l’instauration de réglementations tatillonnes et absurdes par Bruxelles et de décisions diplomatiques catastrophiques (embargo russe).
L’agriculture fournit 70% des besoins de l’agroalimentaire et est le premier secteur industriel de France avec 160,5 milliards de chiffre d’affaires en 2013 mais le monde agricole est en crise permanente. Par exemple l’effondrement du cours a plombé en 2014 de 40% les revenus des céréaliers.
Selon l’INSEE La France compte 515 000 exploitations agricoles. En 20 ans, leur nombre a baissé de plus de la moitié. Les petites et moyennes structures sont les plus touchées alors que le nombre de grandes reste supérieur à celui de 1988. Les secteurs laitiers, de la polyculture et du polyélevage subissent les plus fortes baisses. Les exploitations spécialisées en grandes cultures, soit près d’une exploitation sur quatre, sont celles qui résistent le mieux. Les petites exploitations restent les plus nombreuses mais leur part s’est réduite de 10 points en 20 ans. La disparition d’exploitations permet l’agrandissement de celles qui se maintiennent. En vingt ans, le nombre de travailleurs permanents a baissé de moitié dans les exploitations agricoles. Cette diminution est équivalente à celle du nombre d’exploitations. Les trois quarts de ces actifs permanents travaillent dans les moyennes et grandes exploitations, en qualité d’exploitants ou de coexploitants, d’aide familial ou de salarié permanent non familial.
Le constat est clair, le nombre d’exploitations agricoles diminue drastiquement au profit des plus grandes qui ne cessent de s’accroitre. Face à la détresse des agriculteurs, le président Hollande, en visite au salon de l’agriculture n’a eu que comme seule préoccupation les futures élections en mettant en garde contre un prétendu danger du « populisme » : « Il ne faut pas écouter les populistes, il faut écouter l’Europe qui a des solutions pour les agriculteurs. Le populisme ronge les campagnes, avec eux il n’y aurait plus d’Europe, plus d’aides aux agriculteurs, plus de garanties sur un certain nombre de prix ».
L’échec de la politique agricole commune :
Entrée en vigueur en 1962 à l’époque de l’Europe des 6, la politique agricole commune, intelligente, était efficace et la France en bénéficiait largement. Mais l’élargissement massif et à outrance de l’Union européenne a fait basculer la donne avec l’arrivée de nouveaux pays agricoles, notamment à l’est. Nos dirigeants « mis en minorité dans une Union européenne à 28 pays, ont laissé détruire la PAC, plaçant nos exploitations à la merci des fluctuations des prix mondiaux et de la concurrence déloyale intracommunautaire » selon Nicolas Dupont-Aignan. Si la France reste première bénéficiaire des aides de la PAC avec une enveloppe de 63 milliards d’euros pour les sept prochaines années (2014-2020), le député veut « tordre le cou à cette fausse idée que c’est l’UE qui finance l’agriculture française ». En effet c’est la France qui finance l’agriculture française. Il s’appuie pour le démontrer sur les « 7 milliards d’euros » de contribution nette négative de la France au budget européen. La France abonde en effet plus pour le budget de l’UE qu’elle n’en reçoit de fonds.
L’agriculture française minée par les réglementations de Bruxelles :
Alors qu’elle soumet les agriculteurs à une concurrence déloyale de plus en plus féroce et étendue, l’Union européenne ne cesse de durcir les normes auxquelles ils sont astreints, renchérissant et compliquant toujours plus leurs productions. L’UE s’est spécialisée dans l’édiction de normes écologiques et de tracasseries administratives totalement déconnectées de la réalité du terroir.
Soumis à des réglementations écologistes et environnementales démagogiques les agriculteurs français font en plus face à une concurrence déloyale souvent au sein même de l’Union européenne.
Alors que les côtisations patronales pour l’emploi agricole sont très élevées en France, l’Allemagne et l’Espagne ne se privent pas d’employer une main d’œuvre très bon marché venue de l’Est ou du Sud, soumettant la production française à une concurrence déloyale en termes de prix.
La grande distribution, important de l’étranger des produits de qualité médiocre, comprime les marges des producteurs nationaux.
La France se doit retrouver une politique agricole sérieuse, fixant des prix planchers et favorisant la production communautaire, voir française, à l’extra-communautaire. Des contrôles sanitaires doivent être rétablis aux frontières extérieures. En effet il est impensable d’importer encore des produits qui ne se soumettent pas aux règles et normes que l’on inflige à nos agriculteurs.
Enfin il est primordial d’exclure l’agriculture des négociations sur le traité de libre-échange transatlantique (TAFTA) qui soumettrait l’Europe aux normes américaines.
Mais des décisions politiques récentes ont aussi été un choc terrible pour l’agriculture française.
Lever l’embargo russe :
Reprochant à la Russie son implication dans la crise ukrainienne, l’Union européenne a soumis le pays à de très dures sanctions économiques dès août 2014. Moscou a aussitôt répliqué par un embargo russe sur les produits agricoles européens et donc français. Cela a été et est toujours un coup très dur porté aux agriculteurs français. Les débouchés du marché russe représentaient 737 millions d’euros en 2012 pour les paysans français. « Il faut prendre cet embargo très au sérieux. L’Europe exporte 10% de ses valeurs agroalimentaires vers la Russie, c’est considérable et depuis le mois d’août dernier, les frontières sont fermées dans trois domaines : fruits et légumes, viandes, et produits laitiers. Évidemment, les conséquences sont redoutables parce que, non seulement nous n’exportons plus, mais toute cette marchandise est revenue sur le marché européen et elle a eu pour première conséquence de faire s’écrouler tous les marchés », a déclaré Xavier Beulin, président de la FNSEA premier syndicat agricole. Il demande que l’Europe aide des stockeurs privés à acheter les surplus et à les stocker en attendant que les cours remontent. Mais il compte surtout « sur l’action diplomatique des pays pour dégager cette situation, c’est-à-dire lever les sanctions contre la Russie pour que cette dernière réimporte des produits européens ». Il précise en effet « nous n’y sommes pour rien dans cette affaire. On est sur un dispositif assez incompréhensible pour les paysans ».
Porte-parole de l’UMP, Sébastien Huyghe l’a réaffirmé lundi 23 février 2015, « l’embargo russe contre les importations agricoles européennes constitue « une véritable catastrophe pour l’agriculture française. Cela se traduit par une perte de près d’un milliard d’euros » pour le secteur. »
La réforme de la politique agricole commune peine à arriver et on en distingue mal les contours. La PAC actuelle pèse négativement sur l’agriculture française et nos agriculteurs soumis à des normes très strictes ne peuvent concurrencer les prix de produits extra-européens non soumis à ces règles ou intra-européens issus de pays qui exploitent une main d’œuvre bon marché. L’embargo russe sur les produits agricoles européens, en réponse aux sanctions occidentales contre Moscou, est un coup terrible pour un secteur déjà mis à mal. La Commission européenne se contente en guise de consolation de déclarer qu’il « semble que l’embargo russe fasse plus de mal aux consommateurs de Moscou qu’aux agriculteurs européens ». N’en doutons pas un seul instant, les agriculteurs français se trouveront ragaillardis d’une telle nouvelle !