Les chances d’ascension sociale pour les populations d’origine populaire (enfants d’ouvriers, employés) dépendent moins du dynamisme économique des territoires que de l’accès à l’éducation (enseignement supérieur). France Stratégie préconise de renforcer l’accès à l’éducation pour promouvoir l’égalité des chances. Aide à la mobilité étudiante, élargissement de l’offre universitaire, décloisonnement des Académies ou coopération renforcée entre les académies d’Ile-de-France et des régions alentours : tant de solutions proposées, dépendantes du développement des outils de suivi des élèves selon leur origine sociale à l’échelle nationale. Malgré une mobilité ascendante en augmentation ces dernières décennies, le France se place en infériorité par rapport à la moyenne européenne.

  1. Une mobilité ascendante variable en fonction des régions et les départements

L’ascenseur social connaît un dynamisme variable selon les départements[1] ; les lieux de naissance des membres de la classe populaire[2]. Le département de naissance des employés permet de connaître de façon plus adéquate la mobilité sociale – qui est mesurée par la proportion d’individu né de père ouvrier et se déclarant cadres, professions intellectuelles ou supérieures. Mesuré à l’aune du lieu de résidence des parents à la fin des études de l’individu[3], le taux de mobilité ascendante en Ile-de-France atteint la première place nationale en ce qui concerne les chances de mobilité sociale ; avec un taux de 33%, son niveau est supérieur à la moyenne française. Entre 1977 et 2003, la mobilité ascendante connaît une nette augmentation : la probabilité pour un enfant ouvrier d’accéder au statut de cadre supérieur ou de profession intermédiaire est ainsi passée de 25 à 33%. Accès à l’éducation, transformation de la structure des emplois sont les phénomènes permettant d’expliquer cette croissance.

  1. Les variables de la mobilité ascendante en localité : des écarts dus à l’accès à l’éducation

Un accès limité à l’éducation constitue l’une des conditions des faibles taux de mobilité ascendante. Le contexte économique local a un effet limité sur la mobilité sociale. Liées au niveau d’éducation, les chances de mobilité ascendante sont à mettre en relation avec les diplômes ; pour les individus d’origine populaire, le lieu de naissance du département constitue également une variante à prendre en compte. Toutefois, même dans les régions les plus dynamiques, le taux de diplômés parmi les enfants d’ouvriers et d’employés – à hauteur de 38.9% – n’atteint pas la moyenne nationale. La réussite scolaire constitue l’une des dynamiques permettant de mesurer le développement économique local : la taille de la population étudiante dans la région a un effet positif sur la réussite sociale et scolaire. A l’inverse, le poids des filières professionnelles dans le secondaire (dans l’académie de naissance de l’individu) comporte un effet négatif sur les probabilités de réussite scolaire et sociale. La lettre de France Stratégie s’emploie à démontrer la relation étroite entre éducation et mobilité ascendante : avec une augmentation de 1 point du taux de diplômés parmi les individus natifs du département (toutes origines confondues), la mobilité ascendante s’accroît effectivement de 0.6 point. Quel que soit le dynamisme du département visé, cette conjonction semble être la même partout. Cependant, cette convergence n’est pas toujours effective pour les générations les plus récentes.

  1. L’accès à l’éducation : des enjeux spatiaux. Quelles positions adopter pour les politiques publiques quant à celui-ci ?

Les variables locales jouant un rôle déterminant dans l’avenir des individus d’origine populaire, une meilleure analyse spatiale de la mobilité sociale permettra de mobiliser les politiques publiques dans leur action locale comme nationale. L’étude des quantifications des écarts à l’intérieur des départements (cantons, communes, quartiers) ainsi que l’actualisation des variables locales et leurs effets sur les jeunes générations sont deux directives auxquelles doit s’atteler cette modification.

Immobilité géographique étant souvent synonyme d’immobilité sociale, il conviendrait, selon France Stratégie, d’inciter à la mobilité géographique pour les individus d’origine populaire dans les zones à fort développement, par l’intermédiaire d’un développement de l’offre en logement social dans les zones dynamiques pour y intégrer les familles à faibles revenus. De même, développer les outils de mesure et de comparaison de l’inclusion des classes populaires à l’échelle nationale, académique et infra-académique, permettrait d’évaluer les écarts de réussite scolaire – à origine sociale donnée[4].

Dans l’objectif d’augmenter les taux d’accès au supérieur, une meilleure inclusion des enfants des classes défavorisées doit s’opérer par un plan d’action : lutte contre le décrochage scolaire, rapproche de l’offre de l’enseignement pour les individus d’origine populaire – avec la création d’un système de quotas ou de places réservées, levée de freins à la mobilité géographique desdits individus – par la création d’un système de bourse[5] encourageant à quitter la région d’origine ou encore fusion entre les académies franciliennes et limitrophes sont tant d’actions proposées. L’application de ce plan nécessitera un effort de concentration sur les régions à faible taux de diplômés.

 

[1] Les grandes métropoles présentent un taux de mobilité ascendante de leurs résidents supérieurs à 50%. A l’échelle régionales, trois régions paraissent faibles en termes de taux de mobilité sociale (inférieur à 30%) : la Picardie, le Poitou-Charentes, le Nord-Pas-de-Calais. A l’inverse, l’Aquitaine, la Bretagne, l’Ile-de-France (en tête), le Midi-Pyrénées et le Rhône-Alpes apparaissent comme les régions les plus dynamiques, avec plus de quatre enfants d’employé ou d’ouvrier sur dix y occupant une position de cadre ou de profession intermédiaire. Voir les enquêtes Emploi de 1990-2013 de l’INSEE. France Stratégie, lettre de novembre 2015, n°36.

[2] Ouvriers et employés représentent en 2013, plus de la moitié des actifs selon l’INSEE.

[3] 75% des individus d’origine populaire résident dans leur région de naissance (60% en Ile-de-France).

[4] Le calcul s’opérerait à partir de la Base élèves académiques (BEA) et le panel national d’élèves sortant de l’école primaire. Lettre de France Stratégie, novembre 2015, n°36, p. 6.

[5] Le système d’allocation des ressources doit faire l’objet d’un travail de recherche d’informations sur le bénéficiaire (milieu d’origine, traille des fratries, niveau d’éducation des parents,…).

aloysia biessy