Législative partielle : victoire à la Pyrrhus du front républicain
Il s’en est fallu de peu à la candidate du Front National Sophie Montel de remporter la législative partielle dans le Doubs. En effet, son adversaire socialiste Frédéric Barbier n’a obtenu que 51,43 % des voix. Soit 863 voix d’écart sur 56 communes. L’abstention s’élève à 50,93 % contre 60,44 % au premier tour. Florian Philippot n’a pas manqué d’ironiser sur les réseaux sociaux, en soulignant qu’il aura fallu « la coalition du PS, de l’UMP, du Front de Gauche, du Centre, des Verts, du Premier ministre et même du président de la République » pour battre de 2 points seulement Sophie Montel.
Cette élection risque bien d’être un tournant majeur dans la vie politique française.
Vers la fin du tripartisme ?
Le successeur au siège du ministre Pierre Moscovici n’a fait montre d’aucun triomphalisme le soir de sa victoire. Il sait pertinemment qu’elle n’est pas due à la popularité du Parti socialiste dont il n’était même pas fait mention sur les bulletins de vote. Lors de son discours devant les militants, il n’a d’ailleurs pas manqué de remercier ses nombreux soutiens du front républicain ayant appelé ostensiblement à voter pour lui. A savoir François Bayrou, Jean‑Christophe Lagarde, Alain Juppé, Nathalie Kosciusko‑Morizet, Dominique Bussereau ou encore Gérard Larcher.
Bien que les états-majors des partis de gauche et de droite s’en défendent, le Front National revendique la fin du tripartisme. La candidate du camp patriote Sophie Montel a dénoncé la victoire de Frédéric Barbier, « soutenu par tout le système, toute la caste. Les socialistes n’ont pas à fanfaronner ce soir, nous avons fait voler en éclats le tripartisme. Nous sommes dans un bipartisme avec la caste d’un côté et le FN de l’autre ». Samedi, à la veille du scrutin, Marine Le Pen a estimé que Nicolas Sarkozy, avec son souhait initial d’un appel à voter blanc ou à s’abstenir tout en rejetant le FN, avait fait, « un pas chassé vers le PS ».
Le front républicain est-il toujours pertinent ?
Si Paris continue d’abuser abondamment de l’esprit du 11 janvier pour faire barrage au parti de la droite nationale, le discours a fait long feu chez les Français. Manuel Valls a beau assurer à l’Assemble nationale qu’il mettra tout en œuvre pour sauver la République soi-disant en danger, le peuple s’est chargé de lui rappeler qu’il avait son mot à dire et que le résultat des urnes est souverain.
Les consignes de votes des uns et des autres auront été peu suivies d’effet. Sophie Montel a ainsi progressé de 25 points entre les deux tours. Les électeurs de l’UMP se sont montrés particulièrement indisciplinés quant au mot d’ordre de Nicolas Sarkozy. Alors que celui-ci laissait libres les électeurs tout en appelant à faire barrage au Front National, 30 % des votants UMP auront défié la ligne du parti pour se reporter sur la candidate de la droite.
Les électeurs du Doubs n’ont pas fait preuve du sectarisme qui règne à Paris. Ils ont voté en connaissance de cause et en toute conscience. Les manœuvres des uns et des autres pour osctraciser le Front National ne prennent plus. La polémique ressortant des propos de 1996 tenus par Sophie Montel faisant état d’une éventuelle classification des races aura tenu 24 heures. Elle aura pourtant été abondamment relayée par la presse.
Comment enrayer la machine à perdre ?
Nicolas Sarkozy aura payé cher sa ligne politique du ni‑ni : un sondage en date du 7 février révèle qu’un peu moins de 40 % (39 %) des sympathisants UMP souhaitent la candidature de leur président à la présidentielle de 2017, contre 65 % en septembre dernier, soit une chute de 26 points en cinq mois.
La période des anathèmes voués à culpabiliser les électeurs tentés par le vote FN est terminée. Le parti bénéficie d’une marge de progression conséquente, en témoigne le report des voix dans le Doubs et le taux d’abstention en baisse. Il est l’heure d’affronter la réalité en face. Le discours appelant au rassemblement est un échec, il va falloir désormais se confronter sur le terrain des idées, et accepter que le rôle du responsable politique ne soit pas d’imposer sa vision au peuple, mais d’être à son écoute.
L’UMP doit enfin proposer des solutions claires et précises sur les sujets comme la souveraineté, l’immigration et l’islamisation, l’identité nationale ou encore la défense des valeurs traditionnelles (mariage, protection de la vie). Depuis que le parti est entré dans l’opposition, il s’est montré relativement inaudible, laissant le champ libre au Front National, qui n’a pourtant que deux députés et deux sénateurs au Parlement, bien que revendiquant 6 millions d’électeurs depuis les européennes de 2014.
Le général De Gaulle avait coutume de dire qu’entre les communistes et lui, il n’y avait personne. Si l’UMP persiste à ne pas se positionner clairement, et à ne pas écouter ses militants, elle donnera raison au Front National qui parle d’UMPS dans tous ses discours, et Marine le Pen pourra dire qu’entre la gauche et elle, il n’y a désormais plus rien. Elle est appuyée dans ce sens par un récent sondage BFM-RMC qui plaçait la présidente du Front National comme première opposante à François Hollande, selon 70 % des sondés.