Comme annoncé par les pronostics, le parti grec de la gauche radicale, Syriza, est arrivé largement en tête des législatives de ce dimanche 25 janvier. Pas assez cependant pour atteindre la majorité absolue. A deux sièges près, le parti du leader Alexis Tsipras a dû former une coalition avec le parti de la droite souverainiste, les Grecs indépendants.

Si la classe politico-médiatique française a semblé trouver étrange cette alliance jugée contre-nature, elle est cependant logique au vu des avis de ces deux partis sur l’Europe.

Les points communs :

La Grèce a subi une forte austérité imposée par Bruxelles, sous les directives d’Angela Merkel. Suite aux errements de ses dirigeants, aux révélations de la falsification de ses comptes par Goldman Sachs pour rentrer dans l’Union Européenne, une crise durable s’est installée dans le pays, nécessitant un traitement de choc : coupes budgétaires, baisse des traitements dans la fonction publique, etc. Conséquences immédiates : explosion du chômage, inflation…

Ne voulant pas mourir guérie, la Grèce a envoyé un message fort à Bruxelles. Le vote des Grecs et l’alliance Syriza / droite souverainiste annonce que  le clivage droite-gauche peut être transcendé au nom d’un intérêt supérieur, celui de la nation.

De nouvelles négociations vont donc pouvoir s’engager contre la troïka européenne –BCE / UE / FMI). Le refus de payer la dette de plus de 300 milliards d’euros, asphyxiant le pays, annonce un  renversement de l’équilibre des pouvoirs qui jusqu’à présent a soumis les nations aux financiers. Un message clair a été envoyé à Bruxelles, et nous serions bien inspirés de prendre exemple sur la Grèce : la nation est le cadre naturel pour décider de la politique d’un pays.

Les points de divergence :

Si l’orientation politique de Syriza vis-à-vis de Bruxelles et de son diktat « austéritaire » rapproche le parti de la droite souverainiste, les projets de société de la gauche radicale les divisent profondément.

Le programme de Syriza encourage le phénomène d’immigration massive, avec notamment l’instauration du regroupement familial, la facilitation des naturalisations, l’allongement de la durée de séjour sur le territoire grec et l’égalité des droits entre nationaux et immigrés. Comme la Grèce, membre de l’espace Schengen, est une des principales portes d’entrée de l’Union européenne, la mise en application de ces mesures soi-disant sociales constituera un appel d’air considérable pour une main-d’œuvre bon marché, dont la libre circulation dans toute l’Union européenne sera encore davantage facilitée. Soit une aggravation du dumping social auquel sont déjà gravement confrontés les travailleurs européens.

Le progressisme du nouveau premier ministre Alexis Tsipras et son anticléricalisme risquent également de poser problème dans une société traditionnelle encore très religieuse. Pro-LGBT, défenseur du mariage homosexuel, le leader de Syriza proposait en 2012 l’expropriation de tous les biens immobiliers de l’Église orthodoxe grecque. Mais sa position s’est modérée sur ce point pour ne pas effrayer l’électorat populaire à l’approche des élections.

Et la France dans tout ça ?

Si le sort du peuple grec nous intéresse, celui des Français nous préoccupe davantage. La dette de la Grèce ayant été cédée par les banques et la finance aux Etats, au premier chef desquels se trouvent l’Allemagne et la France, son non-remboursement pourrait coûter 40 milliards d’euros aux contribuables français.

Enfin la politique migratoire de Syriza créera un appel d’air conséquent dans l’espace Schengen, et pourrait signifier un afflux de migrants supplémentaires en France, déjà bien submergée.

Vers la fin de la zone euro ?

Alexis Tsipras, pro-européen convaincu, assurait le 30 décembre être attaché à l’équilibre budgétaire et vouloir que la Grèce demeure dans la zone euro. Or y demeurer suppose le respect des critères de Maastricht. Critères que la Grèce semble bien incapable de tenir. Par ailleurs, Angela Merkel déclarait récemment qu’une sortie de la Grèce de la zone euro n’était plus inenvisageable.

Cette sortie, si elle se concrétisait, ouvrirait de nouvelles perspectives et d’autres pays pourraient bien suivre l’exemple. L’euro ne serait donc pas une autoroute sans sortie, comme tous les défenseurs de la monnaie unique l’assurent depuis sa création.

D’après le prix Nobel d’économie Maurice Allais, « il est très difficile de créer une monnaie commune, mais il est très facile d’en sortir. »

 

Il est encore trop tôt pour savoir ce que donnera l’application du programme de Syriza, et quel impact elle aura dans l’Union européenne et en France. Reste à savoir également si les promesses électorales d’Alexis Tsipras pourront être tenues, sachant qu’elles sont basées notamment sur un retour de la croissance et une réforme fiscale de grande ampleur. Affaire à suivre.

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