Ile-de-France : comment l’ARS peut-il lutter contre les déserts médicaux ?
En Ile-de-France, les différents rapports et études fournies par l’ARS pointent de nombreuses évolutions du système de santé actuel. Comment l’ARS Ile-de-France peut-il encourager la résorption des déserts médicaux ?
Constat de la situation actuelle
A) Quels besoins ?
Les besoins en matière de soins ne cessent de s’accroître, en vertu du vieillissement de la population, conjointe à celle des médecins. La transition épidémiologique (les maladies chroniques prennent le pas sur les maladies aigues face aux progrès de la médecine et l’augmentation de l’espérance de vie) constituent aussi un facteur des besoins croissants à laquelle fait face la population d’Ile-de-France en matière de soins. En effet, les maladies chroniques nécessitent plus de suivi et plus de recours aux soins. Une évolution mécanique engendre une forte demande et un fort recours au système de santé.
Désormais, le virage ambulatoire – le retour au domicile après une prise en charge médicale – se fait plus tôt. Les patients restent moins longtemps à l’hôpital, d’une part car c’est une volonté de la patientèle et d’autre part parce que les coûts des séjours en hôpitaux sont devenus trop important. Le retour à la médecine de ville doit constituer une offre adaptable à l’évolution en fonction des pathologies. Face au recours aux soins, il doit s’opérer une véritable évolution du comportement des personnels. La santé est devenue un service consommable à part entière ; les patients manquent d’informations à ce sujet et utilisent le recours aux soins de manière excessive. Avec les nouvelles technologies qui insèrent la santé partout, le patient est déboussolé face à l’utilisation du système de santé.
B) Evolution du système de santé : facteurs et freins
L’évolution du système de santé et l’offre proposée en matière de médecine libérale est due à l’évolution démographique (les médecins vieillissent et partent à la retraite) comme l’évolution sociologique. D’une part, les médecins n’acceptent plus de faire des journées de près de 15h et d’autre part, la féminisation de la profession ne permet pas d’associer la maternité avec le rythme de travail qu’effectuait les médecins il y a encore 10ans.La volonté des jeunes médecins à exercer en groupe, à être salarié et non plus libéraux et aussi de mixer l’activité médicale avec des spécialistes ou autres professions médicale et paramédicale constitue également un facteur.
De nombreux obstacles freinent l’évolution du système. Tâches administratives, soucis d’accessibilité des cabinets en région parisienne, les loyers et les charges très élevées à Paris et en IDF par rapport au reste de la France tout comme la nécessité du médecin à effectuer une activité de soutien social face à la précarité ou aux problèmes familiaux rencontrés, constituent autant d’obstacles.
Ces différents phénomènes entrainent une réduction de l’offre de médecins généralistes exerçant en libéral et engendre des risques de report aux stratégies de soins moins efficientes et moins graduée (nombreux recours aux urgences). Face à ces freins, apparaît alors un risque d’accroissement des inégalités et de recours aux soins qui s’illustre simplement par le renoncement aux soins.
C) Un traitement inégal en matière de soin ?
Aucun chiffre précis n’est actuellement disponible pour prouver qu’il existe une réelle disparité de traitement en matière d’accès aux soins. Néanmoins l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) détermine les causes du renoncement et sa cible principale. Selon l’officine, la catégorie des jeunes de 18 – 25 ans est la plus concernée par le renoncement aux soins car c’est une population qui est en phase de transition (ils passent de la mutuelle de leurs parents à la leur, ils n’ont plus de médecins traitant car ils changent de ville pour leurs études, catégorie d’âge qui n’a pas besoin de soins récurrents, manque de temps …). Ces différentes causes favorisent le renoncement. De même, la catégorie des jeunes retraités est aussi concernée, du fait de l’arrêt de la mutuelle de l’employeur, lors du passage à la retraite. Ces deux populations vont plus facilement dans les hôpitaux soit par méconnaissance des médecins disponible aux alentours, soit par praticité.
Parallèlement, le nombre de médecins augmente très légèrement en Ile-de-France. En 2012, ce sont 200 017 médecins présents sur le territoire tandis qu’on en compte 200 028 en 2017. Le problème réside dans la répartition des professionnels de santé sur le secteur qui préfèrent le salariat au dépit du libéral. Le phénomène de déconcentration territoriale est un inconvénient majeur pour la région : les médecins sont toujours plus attitrés par les centre villes et les centre péri-urbains. Pourtant, l’Ile-de-France est la région de France ou s’accroissent le plus vite et le plus largement les zones déficitaires. L’abondance des médecins en Ile-de-France dans les années 80 a caché les problèmes auxquels nous faisons face actuellement. En effet, nous n’avons pas pris la mesure du départ en masse des généralistes à la retraite (- 6% de généralistes) – première raison de la désertification de certaines zones – alors que notre réseau hospitalier reste très dense.
II. Quelles solutions aux déserts médicaux en Ile-de-France
Agé en moyenne de 57 ans, le médecin généraliste francilien dispose en moyenne d’un cabinet à 40 ans. 44% des généralistes ont plus de 50 ans L’Ile-de-France reste pour eux une région attractive à l’installation. Mais le problème demeure, puisqu’ils ont tendance à s’installer dans des communes ou exerce déjà un praticien.Aujourd’hui ce sont 4300 actes qui sont pratiqués par an à temps plein contre 4 100 actes par an en 2004 par des médecins généralistes. Les effectifs des professionnels ont baissé alors que les actes exercés ont augmenté de 3.7%
A) Quelles sont les possibles évolutives d’ici 2025 ?
A ce jour il n’y a que très peu de visibilité car les évolutions sont trop rapides et trop nombreuses, peuvent infléchir sur le processus. Cependant l’Ordre des Médecins à tout de même publié un Atlas sur les éventuelles courbes futures.
La résolution de la situation passerait par une polarisation de l’offre, en concentrant dans certaines communes sans médecins – ou dans celles dans laquelle résident des médecins de plus de 60 ans – du personnel médical. De même, l’établissement d’une démographie des spécialistes doit être pensée : il existe à l’heure actuelle un taux confortable de médecins spécialisés en Ile-de-France, taux qui vire pourtant à la baisse.
B) Les actions de l’ARS
La politique actuelle de l’ARS Ile-de-France consiste à l’incitation du travail en collaboration avec les tous les URPS, les Fédération des centres de santé, Les Ordres et l’assurance maladie. Cette politique permet selon l’ARS d’établir une réelle cartographie des besoins et de surcroît des solutions à entreprendre. Le contexte actuel permet une totale liberté d’installation pour les médecins c’est pourquoi l’ARS propose des outils tel que :
- La création de permanences locales d’aide à l’installation (400 permanences locales)
- Des Journées de découvertes des territoires
- Le financement de l’URPS pour coacher les médecins afin d’aider à l’installation
- Création d’un portail d’appui aux professionnels de santé (PAPS) et d’un portail de soutien aux professionnels sur les aides administratives
- Publication d’un guide d’aide à l’installation et au maintien
- La révision du zonage en 2015 pour élargir les zones déficitaires et ou les professionnels sont aidés
Ces actions doivent, selon l’ARS, être mise en place avec des actions du pacte territoire santé, en collaboration avec le Ministère de la Santé (PTMG ; MGES) mais également à travers l’ancrage dans les territoires de structures pouvant accueillir les professionnels, l’établissement de diagnostics territoriaux permettant de mettre en relations les élus et les professionnels de santé du territoire, la pérennisation des centres et maisons de santé, le soutien au développement des centres de santé, l’étude des conditions favorables d’implantation de centres et l’accompagnement des structures signataires du règlement arbitral conventionnel (qui complète la rémunération à l’acte).
C) Les perspectives
Après l’étude complète des problématiques rencontrées et l’énumération exhaustive des actions de l’ARS, il a été impératif d’établir les perspectives, certes mouvantes, de l’avenir du système de santé francilien. Tout en pérennisant les actions efficientes menées par l’ARS ces dernières années, d’autres perspectives s’offrent au territoire de l’Ile-de-France.
Le nouveau zonage territorial, qui permettra de constituer un véritable mapping des besoins et rendra compte de l’efficacité des outils mis en place. Par ce zonage, le développement du périmètre s’étendra d’autant plus et centralisera les cabinets isolés. De même, le budget visant à la résorption des zones déficitaires devra se centrer tant sur le fonctionnement que sur l’investissement. D’autre part, la convention de l’assurance maladie signée en aout 2016, prévoit des aides à l’installation et par là, l’ARS peut venir afin de moduler les aides c’est-à-dire favoriser et augmenter les aides dans les territoires sélectionnés (aides financière pour 20% des médecins jusqu’à 60 000 euros). Enfin, l’ARS compte sur le développement des dispositifs prévus dans la loi de modernisation du système de santé de janvier 2016. A l’instar des CPTS (Communautés Professionnelles Territoriales de Santé) qui se trouvent à mi-chemin entre un exercice isolé et un exercice en maison de santé (ce sont des médecins, des pharmaciens, qui réfléchissent ensemble à un système de santé global en restant chacun sur leur territoire géographique mais en travaillant à des politiques de santé ensemble pour l’amélioration de l’accès au soin dans un département) ou des PTA (Plateformes Territoriales d’Appui, qui doivent inciter à l’utilisation de ce numéro vert dans l’objectif d’orienter le patient vers des services afin de permettre la coordination des actions et de la répartition de l’offre en fonction des besoins. La dernière perspective et non des moindres est la volonté d’accroissement des enveloppes financières. Il s’agira de dimensionner la stratégie régionale en fonction des besoins que nécessite le plan d’action sur 5 ans.