Conséquence logique du mariage et surtout de la « filiation pour tous », la gestation pour autrui (GPA), bien qu’interdite en France, connait une certaine tolérance des pouvoirs publics. Les enfants « commandés » et conçus  à l’étranger reçoivent par la « circulaire Taubira » une reconnaissance de la part de la République française. Cette circulaire encourage à contourner une loi pourtant bien nécessaire pour conserver un principe fondamental  bioéthique : la dignité de la personne et l’indisponibilité du corps humain.

Une proposition de loi visant à « lutter contre les démarches engagées par des Français
pour obtenir une gestation pour autrui
 » a été déposée. Le vote aura lieu jeudi 4 décembre 2014.

La gestation pour autrui, une pratique inacceptable :

La gestation pour le compte d’autrui est une pratique consistant pour un couple ne pouvant pas avoir d’enfant à conclure une convention avec une femme, pour que celle-ci porte un enfant, enfant pouvant ou non être conçu avec les gamètes du couple, qu’elle s’engage à abandonner après sa naissance afin qu’il soit élevé par ce couple. Les couples recourant à la gestation pour le compte d’autrui peuvent être des couples de personnes de sexes différents dont la femme est atteinte d’une infertilité l’empêchant de porter un enfant, ou des couples composés de deux hommes.

Cette pratique est préoccupante, la légaliser ou la tolérer serait terrible pour la société et notamment pour les enfants conçus ainsi.

Selon Aude Mirkovic, juriste spécialisée dans le droit de la famille, « la GPA organise, planifie, la conception d’un enfant dont il est prévu ab initio qu’il sera séparé de la femme qui l’a porté. On impose donc à cet enfant, délibérément, une blessure d’abandon. Le fait que certains enfants vivent cela, du fait des malheurs de la vie, ne justifie en rien de l’organiser. En outre, un enfant adopté sait que ses parents adoptifs ne sont pas responsables de ce qu’il a vécu et que, au contraire, ils sont intervenus pour « réparer » ce qui lui été arrivé, à savoir manquer de son père d’origine, de sa mère d’origine ou des deux. En revanche, lorsque les enfants vont réaliser que cette blessure leur a été infligée, non du fait des aléas de la vie mais par la décision délibérée de ceux-là même qui prétendent les aimer, cela va sans doute faire beaucoup de dégâts. »

Cette pratique prive l’enfant d’une branche de sa filiation biologique, car la femme qui le reçoit n’est pas sa mère biologique. Là encore, c’est une situation que les malheurs de la vie peuvent susciter, mais il est injuste de l’infliger délibérément à l’enfant, pour satisfaire le désir d’enfant d’autrui. Lorsque la GPA intervient au profit d’un couple d’hommes ou d’un homme seul, l’enfant est non seulement privé de sa mère, mais de mère tout court. L’enfant est privé de lignée maternelle.

De multiples manières, la GPA réalise une grave maltraitance à l’égard de l’enfant, au mépris de ses droits élémentaires et, notamment, son droit de connaître ses  parents et d’être élevé par eux, protégé par la Convention de New York sur les droits de l’enfant, que la France a ratifiée.

La question de la mère porteuse et de la « location d’utérus », sorte de néo esclavagisme, est préoccupante. Acheter à une femme l’abandon de l’enfant qu’elle a porté est toujours une pratique indigne. L’exploitation des femmes pauvres et l’utilisation des femmes, pauvres ou non, comme machines à fabriquer des enfants est inacceptable. Pourtant certains comme Pierre Bergé essaient de nous faire croire que « Louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine » sont deux choses similaires et que la GPA est donc moralement acceptable.

La GPA restant mal vue, à juste titre, en France et dans de nombreux pays, les couples demandeurs se rendent à l’étranger, souvent aux Etats-Unis ou en Thaïlande[1], puis reviennent avec l’enfant qu’ils font reconnaître en France sans être inquiétés par la loi. Si la GPA est interdite en France, elle est tolérée voir encouragée par la « circulaire Taubira ».

 

La GPA et le droit français :

En 1991, l’assemblée plénière de la Cour de cassation se prononça fermement contre la GPA, en décidant que « la convention par laquelle une femme s’engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes ».

En vertu du principe d’indisponibilité du corps humain, la GPA est interdite (par la première loi de bioéthique en 1994) en France sous l’effet de l’article 16-7 du code civil qui dispose que « toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ». Entre 2009 et 2011, le Conseil d’Etat et le Comité consultatif nationale d’éthique (CCNE) ont préconisé le maintien de l’interdiction. Au cours des débats parlementaires sur la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, tous les amendements déposés, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, visant soit à légaliser la GPA, soit à lui reconnaître des effets juridiques en France lorsqu’elle a été réalisée à l’étranger, furent largement repoussés.

Et pourtant l’efficacité de cette interdiction est menacée par deux mesures.

L’arrêt Mennesson contre France a étérendu par la Cour européenne des droits de l’homme le 26 juin 2014, dans le cadre d’une affaire dans laquelle un couple français, après avoir eu recours en Californie à une GPA, s’était vu refuser la transcription des actes de naissance des enfants à l’état civil français. La CEDH a jugé que ce refus portait « atteinte au droit des enfants au respect de leur vie privée, dont le droit à la reconnaissance de l’identité et de la filiation constitue un aspect ». Etonnement ou habilement, la France n’a pas fait appel de cette décision, acceptant par là le recours par des Français à la GPA à l’étranger.

Cette décision vient en effet conforter une circulaire du Ministère de la Justice, dite « circulaire Taubira », qui a été rédigée fin janvier 2013, afin de faciliter la délivrance de certificats de nationalité française aux enfants conçus par GPA à l’étranger.

La proposition de loi :

Une proposition de loi « visant à lutter contre les démarches engagées par des Français
pour obtenir une gestation pour autrui
 » est examinée à l’Assemblée nationale. Portée notamment par  Jean Leonetti, elle veut « s’opposer aux contrats de « mères porteuses » portant atteinte à la dignité humaine et au corps de la femme et dont l’enfant est l’objet du contrat niant ainsi son statut de personne humaine » en renforçant notre dispositif législatif de lutte contre cette pratique.

L’article 1er veut renforcer les sanctions à l’encontre des agences qui organisent ce trafic d’être humain en doublant les peines actuellement prévues par la loi. Le « fait de provoquer soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus d’autorité, les parents ou l’un d’entre eux à abandonner un enfant né ou à naître » sera puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende (au lieu de 6 mois et 7500€). Le « fait de s’entremettre entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre » sera puni de deux années d’emprisonnement et 30 000 euros d’amendes (au lieu d’un an et 15 000€).

L’article 2 veut punir les personnes qui ont recours à cette pratique illicite, ainsi que les démarches auprès d’agences organisant la GPA. Il crée deux nouveaux délits pour les « clients ». Le premier délit sera constitué par le « fait d’effectuer des démarches auprès d’agences ou d’organismes, français ou étrangers, permettant ou facilitant, contre un paiement, la pratique de la gestation pour le compte d’autrui » et sera puni de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende. Le second délit sera constitué par le « fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir la naissance d’un enfant par la pratique de la gestation pour le compte d’autrui, sur le sol français ou à l’étranger, contre un paiement, quelle qu’en soit la forme » et sera puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

Cette proposition de loi va dans le bon sens. Elle vise à sanctionner plus durement le recours à la GPA et ceux qui l’organisent. Le terrible signal donné par la « circulaire Taubira » et la CEDH doit être contré par une dissuasion sérieuse. Cette proposition est très importante dans une société en perte de repères. L’Institut Renaissance espère que les députés, sensibles à cette question seront présents et nombreux à voter en faveur de cette proposition de loi.

[1] Il faut noter que  le Parlement thaïlandais a adopté  le 28 novembre 2014 en première lecture un projet de loi visant à interdire le recours aux mères porteuses.

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